dessine-moi un mouton
Difficile de ne pas tomber dans la banalité ici, de raconter des histoires intéressantes au plus haut point pour un "commun des mortels" assoiffé de sensationnel.
Je ne suis qu'une pauvre fille ordinaire, qui tente d'exister et de se sentir vivre par divers moyens téléphonés et sans originalité (ce que je jette ici). Ne pas attendre la moindre nouveauté, création, seulement un ramassis de déchets assemblés autour d'émotions communes à tous.
Ce qui m'est mémorable n'est que rarement racontable, car trop long ou trop compliqué une fois passé dans les méandres, les rouages de mon si minuscule intellect ramolli du bulbe, endormi par des années de matraquage "éducatif", tout juste bon à nous mouler tel un outil, chair à profit.
Que faire donc pour se sentir exister... De nombreuses solutions, éphémères, rapidement épuisées. Se faire du mal, se faire du bien. Après, toujours l'isolement, la réflexion, le ressentiment, le regret, l'amertume, l'enlisement, l'étouffement, le naufrage... La tête hors de l'eau quelques secondes, le temps d'une courte bouffée d'air, ne pas toucher le fond, avant la prochaine noyade.
On rejoint ce fameux poisson rouge, lui qui n'a une mémoire vive que de courte durée. Il n'a pas même le temps de ressentir. Nous, si. Pire, nous nous souvenons. Ainsi, ces bribes de passé, soigneusement découpées, compilées, assemblées, nous projettent les quelques bons moments en boucle, nous poussent à réemployer de vains moyens pour les atteindre à nouveau.
Fichu cercle vivieux.
Voilà mon cerveau de nouveau réduit en bouillie par tant d'efforts de réflexion... Mais qu'est-ce qui ne lui a pas été enseigné ? Qu'a-t-il découvert sans a priori ? J'ai beau cherché, je ne me souviens pas... Un grand trou noir, probablement le fruit de quelque manigance ou complot, fomenté afin d'occulter les premiers instants de vie.
Humain imparfait, toi qui m'a tout appris, je te somme de disparaître dès mon commencement, je ne veux pas passer par le moindre utérus, je veux tout faire, moi, me créer même.
C'est donc ça le drame, la dépendance à l'autre. Qui n'a jamais dépendu d'un autrui ? Seuls les premiers. Loin avant ceux-là. Espoir d'un proche après.
Ci-gît la pensée égarée d'une brebis gâleuse, un peu frêle, mais très sereine.